Les sols ne se limitent pas aux horizons de surface humifères. Ils comprennent aussi des horizons dits profonds qui remplissent des fonctions essentielles, en particulier pour le développement de la végétation.
Parfois absents dans les sols très minces, les horizons profonds sont les couches de sol situées entre la couche supérieure plus ou moins riche en matières organiques et la roche sous-jacente non altérée. Sous nos climats, ils débutent à une profondeur de 5 cm (certaines formes d’humus forestières) à 30-35 cm (sols profondément labourés) pour une épaisseur allant de 10 à 180 cm (parfois encore plus).
Le grand public a trop tendance à croire que les sols se limitent à la couche de surface plus ou moins riches en « humus ».
Rappelons que sont appelées horizons les couches superposées d’un sol, montrant des aspects et des propriétés différentes les unes des autres. Cette différenciation selon un axe vertical résulte de phénomènes naturels qui se sont succédés au cours du temps sur des milliers voire des centaines de milliers d’années.
Nous allons voir quels rôles ces horizons profonds jouent vis-à-vis de toutes les fonctions que nous attribuons aux sols :
- Possibilités d’enracinement des plantes annuelles et pérennes, cultivées ou spontanées ;
- Ancrage mécanique des arbres ;
- Aération suffisante pour permettre une activité biologique et le développement racinaire ;
- Stockage et circulation de l’eau ;
- Cycle biogéochimique naturel (remontées du calcium et autres minéraux via les racines) ;
- Filtrage et épuration des eaux de pluie et de nos effluents liquides ;
- Traficabilité ;
- Habitat des vers de terre anéciques (lombrics) ;
- Stockage de carbone.
Certains de ces rôles sont également joués par les horizons de surface, mais les horizons profonds, de par leur volume le plus souvent nettement supérieur, jouent un rôle quantitativement plus important.
Possibilités d’enracinement des plantes annuelles et pérennes
Les plantes annuelles comme le blé de printemps ou le maïs ont peu de temps pour implanter profondément leurs racines et elles s’enracinent principalement dans l’horizon labouré, car la plus grande part des nutriments (engrais) s’y trouve. Elles atteignent cependant facilement 60 cm voire un mètre de profondeur si le sol s’y prête. En certaines circonstances, comme une sécheresse exceptionnelle, elles développent leur système racinaire encore plus profondément, notamment pour y trouver de l’eau (voir encadré ci-dessous).
Bilan hydrique d’une culture de blé (d'après Katerji et coll., 1984)
Dispositif
Suivi réalisé pendant 4 années dans un sol profond sous blé d’hiver. Mesures décadaires (tous les dix jours) de l’humidité par dispositif neutronique tous les 10 cm jusqu’à 1,60 m. Mesures de l’évapo-transpiration réelle (ETR) et des précipitations P.
Principales conclusions de l’étude
Pour les années à été sec (1976 et 1979), le déficit réel Σ(P – ETR) est supérieur à la variation du stock d’eau du sol constatée dans la tranche 0-170 cm, traduisant une remontée totale d’eau d’environ 100 mm, aussi bien pour le blé que pour la luzerne.
De tels chiffres ne sont pas négligeables. En 1976 (année de sécheresse exceptionnelle), les rendements céréaliers ont été satisfaisants sur les parcelles étudiées. Les besoins en eau des cultures peuvent donc être couverts à partir de réserves présentes dans le sol, y compris dans des couches très profondes (> 170 cm), en période de sécheresse marquée. Des prélèvements ont montré que 80 % de la masse racinaire se situaient dans la tranche 0-75 cm.
Les auteurs ne sont pas parvenus à déterminer si les 100 mm supplémentaires utilisés étaient dus à un phénomène de remontée capillaire ou à l’absorption par les racines au-delà de 170 cm de profondeur.
Commentaires
Dans des circonstances de sécheresses exceptionnelles le blé a dû faire descendre ses racines à beaucoup plus que 75 cm de profondeur pour s’approvisionner en eau. Il n’y a pas de lien entre « abondance des racines » et « efficacité des racines » en cas de besoin (lors d’une période critique).
En revanche, il est bien connu qu’une plante cultivée pérenne comme la vigne peut s’enraciner jusqu’à deux mètres de profondeur, voire beaucoup plus. Il en va de même de certains arbres forestiers capables en outre d’exploiter des fissures dans des roches dures sur plusieurs dizaines de mètres. Mais l’enracinement des arbres se développe également latéralement, ce qui permet la prospection de volumes considérables (voir encadré ci-dessous).
Enracinement de chênes de 150 ans dans le Doubs (d'après Lucot et Bruckert, 1992)
La densité racinaire, l’inclinaison, l’extension latérale et en profondeur des racines ont été mesurées sur des chênes pédonculés âgés de 150 ans et établis dans un sol brun lessivé colluvial. Les matériaux pédologiques, limono-argileux puis argilo-limoneux… sont accumulés sur 4 m d’épaisseur au-dessus d’une roche calcaire karstifiée. Le sol actuel, ainsi que les horizons pédologiques sous-jacents, permettent un développement racinaire sans contrainte physique ou chimique, jusqu’à la roche. Les chênes pédonculés ont un système racinaire qui peut être divisé en deux parties : le système de surface, qui s’étend jusqu’à 60 cm de profondeur et le système profond, situé en dessous de 60 cm. Au niveau du système de surface et dans un rayon de 3 m autour de l’arbre, l’enracinement est intensif et composé de racines de tous diamètres (moins de 1 mm à plus de 10 cm), avec une densité racinaire maximale. Les racines ont une inclinaison de 80-85° par rapport à la verticale. L’enracinement extensif peut s’étendre jusqu’à une distance de 20 m de l’arbre. Le système racinaire profond, qui se développe dans un rayon de 2-2,5 m, est subdivisé en 2 parties : de 60 à 120 cm (système profond intensif) et en dessous de 120 cm, jusqu’à plus de 4 m (système profond extensif). Il est composé de racines subverticales (pivots). Une estimation des volumes de sol prospectés de façon intensive et extensive donne respectivement 17 et 800 m3.
Voir également : une vidéo montrant les racines d’un chêne de 15 ans dans le Kent.
Dans le cas des essences forestières, une très faible quantité de racines fines présentes en profondeur peut assurer une prospection des réserves en eau primordiale en période de sécheresse, quand les horizons supérieurs sont secs. Hénin et coll. (1969) précisent en outre qu’une racine (fine et saine) est capable d’utiliser de l’eau dans un rayon de 1 à 10 cm. Il convient donc de ne jamais négliger la description des enracinements en profondeur, même si les racines paraissent peu nombreuses.
La pénétration des racines est favorisée dans les horizons profonds par l’existence d’une « structure macroscopique » en agrégats, qui génère toutes sortes de vides connectés (Figure 1 ; voir aussi partie 4). Au contraire, l’existence d’obstacles naturels (d’origine pédologique) ou engendrés par des actions humaines est défavorable à tout enracinement. Ces obstacles constituent des contraintes d’autant plus préjudiciables pour les plantes (et donc pour les cultures) qu’ils apparaissent plus près de la surface. On distingue :
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Des obstacles physiques : niveaux naturellement très denses (fragipans1) ou imperméables (niveaux argileux non structurés ou gonflés), encroûtements calcaires ou accumulations ferrugineuses (grison, mâchefer2).
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Des obstacles chimiques : le calcaire lorsqu’il est sous forme de particules très fines (calcaire « actif ») s’avère un obstacle absolu à l’enracinement des plantes strictement calcifuges. Il en va de même de l’aluminium dit « libre3 » lorsque le pH du sol est inférieur à 5,5 qui peut provoquer une forte réduction de la croissance des racines. Ces dernières deviennent épaisses et peu ramifiées et ne sont plus capables d’assurer l’alimentation minérale et hydrique des plantes. C’est la toxicité aluminique.
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Des obstacles hydriques : des horizons engorgés même temporairement constituent une forte contrainte à l’enracinement à cause des conditions d’hypoxie qui y règnent. Cela explique l’emploi de techniques d’assainissement en agriculture (drainage par tuyaux enterrés, creusement de fossés). Seules certaines espèces végétales sont adaptées à ces hypoxies, par exemple les aulnes.
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Enfin, il existe des obstacles générés par des pratiques agricoles, telles les « semelles de labour », minces niveaux tassés qui se forment parfois à la base de la couche labourée et que les jeunes racines auront du mal à traverser.
Ancrage mécanique
Si son enracinement est trop superficiel et limité à l’horizon de surface humifère, un arbre risque d’être abattu dès la première tempête ! Qu’on se souvienne des dégâts des deux tempêtes de 1999 et 2000.
Aération
Dans tous les horizons, même les plus profonds, la présence de dioxygène est nécessaire à la respiration de tous les organismes aérobies et des racines. L’aération, tributaire de la structure macroscopique de chaque horizon, est nécessaire à la vie microbienne sans laquelle il n’y aurait pas de minéralisation des matières organiques, ni surtout d’absorption des nutriments par les racines. En particulier, les mycorhizes jouent un rôle fondamental dans la nutrition hydrominérale de la plupart des plantes.
Stockage et circulation de l’eau
Réservoir et réserve d’eau dans le sol
Dans le sol, l’eau peut être stockée et rester accessible aux plantes dans une certaine fourchette de dimensions des vides. À travers les vides les plus gros, de plus de 10 micromètres (espaces entre les agrégats, chenaux de vers de terre, trous de racines), s’effectue un ressuyage1 rapide par gravité. Dans les très petits pores et interstices (< 0,2 micromètres) l’eau est retenue trop fortement et s’avère incessible aux racines. Les horizons profonds sont le lieu principal de stockage de l’eau utile aux plantes à la fois parce que leur volume est au moins égal et le plus souvent très supérieur au volume de l’horizon de surface et parce qu’ils sont à l’abri de l’évaporation directe.
Le réservoir en eau est un volume de porosité qui peut contenir durablement de l’eau et est donc une caractéristique relativement permanente d’un horizon ou d’un sol. Mais une partie seulement de ce réservoir est accessible aux plantes, c’est le réservoir utilisable. En revanche, la réserve en eau utilisable est la quantité d’eau utilisable se trouvant effectivement dans le réservoir à un moment donné. L’analogie avec votre automobile est évidente : son réservoir d’essence a beau contenir jusqu’à 60 litres, il peut être à moitié ou totalement vide.
Circulation d’eau par remontées capillaires
L’eau présente dans les horizons profonds, en plus d’avoir une origine météorique, peut provenir de remontées capillaires. Celles-ci prennent naissance à partir d’une nappe phréatique profonde. Dans les cas les plus favorables (horizons à textures fines) elles pourraient atteindre un mètre et, en année sèche, atteindre 100 mm ce qui constituerait un appoint non négligeable. Ces remontées se faisant par les pores les plus fins, le flux d’eau ne couvrirait cependant pas les besoins instantanés des plantes et ne parviendrait pas à les alimenter suffisamment. Ne pas confondre avec le cas particulier des sols crayeux, souvent fort minces, bénéficiant des remontées capillaires dans la masse des craies restées en place. C’est ce qui explique l’étonnante fertilité de ces sols pourtant minces et hypercalcaires.
Circulation d’eau par ascenseur hydraulique
La circulation de l’eau dans les horizons profonds, en plus des phénomènes déjà décrits, pourrait impliquer un phénomène d’ascenseur hydraulique (ou hydrique). Cette notion, développée en agroforesterie, mais non prouvée avec certitude pour le moment, correspond à une redistribution nocturne d’eau dans le sol, du bas vers le haut, par les racines des arbres. Les racines présentes dans les horizons supérieurs secs exsuderaient de l’eau en provenance des racines situées dans les horizons inférieurs encore humides (Dupraz, 2009).
Stagnations et engorgements
Si les horizons profonds ont des structures trop « ajustées2 » (horizons argileux à argiles gonflantes) ou bien s’ils présentent des structures continues, les eaux de pluies ne s’évacuent que très lentement et stagnent dans les couches supérieures du sol (Figure 2). Les agriculteurs considèrent alors qu’il y a « excès d’eau » et cherchent à éliminer cet excès par des techniques d’assainissement.
Le cycle biogéochimique naturel (sol → plantes → sol)
Des éléments minéraux présents sous formes dissoutes dans la solution du sol, indispensables au développement des plantes (tels le phosphore, le potassium, le calcium, les oligo-éléments) ou inutiles voire potentiellement toxiques (comme les éléments en traces), sont absorbés par les racines des végétaux, et ce dans tous les horizons effectivement prospectés par lesdites racines. Une fois absorbés par les plantes, ces éléments sont transférés dans leurs différents organes (tiges, troncs, branches, feuilles, fruits, graines).
Après la mort du végétal, ces éléments retournent finalement au sol soit directement (décomposition in situ des racines mortes) soit en tombant à sa surface (débris des parties aériennes, litières forestières). C’est là que les matières organiques fraîches vont être décomposées plus ou moins rapidement par l’activité biologique (microarthropodes dont collemboles, nématodes, lombrics, filaments de champignons, algues, bactéries) jusqu’à, dans les formes d’humus les plus « actives », une minéralisation complète et donc la libération des éléments chimiques sous des formes assez mobiles et plus facilement biodisponibles.
Finalement il s’agit bien d’un cycle fermé allant du sol au sol en passant par la végétation, mais la majorité des éléments absorbés sur toute l’épaisseur de sol prospectée par les racines retombe à la surface. Dans les premiers centimètres du sol, l’abondance de ces éléments et la bonne aération expliquent que l’activité biologique y soit la plus intense. En milieu naturel, même très pauvre chimiquement (forêt amazonienne, forêts tempérées sur sols acides), le cycle biogéochimique suffit au maintien de l’écosystème en équilibre.
Dans les agrosystèmes ou dans les forêts de production le cycle est rompu (Figure 3, flèche 9) : les humains prélèvent une partie ou la totalité des végétaux (épis de blé, salades, carottes, pommes de terre, fourrage, troncs d’arbres), qu’ils soient cultivés ou non, et les emportent ailleurs. Une part plus ou moins importante de la biomasse est donc exportée avec les éléments qu’elle contient. Très généralement, les produits alimentaires (farine, légumes, fruits), le bois et leurs déchets (balle de blé, épluchures, excréments humains ou animaux, sciure, cendres de foyers) ne sont pas restitués à l’endroit où ils ont été prélevés. Il en résulte un appauvrissement progressif du milieu au fur et à mesure des récoltes. En milieu forestier cela peut conduire à une acidification progressive du sol. Les écosystèmes les plus « pauvres » sont assez rapidement mis en déséquilibre et dépérissent. Sous agriculture (même biologique) il est donc indispensable de restituer aux sols tous les éléments (azote, phosphore, potassium, calcium, oligoéléments, matières organiques) qui leur ont été enlevés, c’est la raison de l’apport des fertilisants et des amendements (organiques, calcaires). Sous agriculture intensive, où les exportations sont massives, cette nécessité de restitution est encore plus impérative.
Filtrage et épuration des eaux de pluie et de nos effluents liquides
Il s’agit d’un phénomène naturel lent, mais aussi d’une capacité utilisée par les humains pour épurer leurs eaux usées. Un exemple célèbre est celui des eaux non traitées de l’agglomération parisienne, épandues massivement sur la plaine de Pierrelaye et autres champs d’épandages (Triel-sur-Seine, Gennevilliers) pour y faire du maraîchage. Mais cette capacité d’épuration n’est pas illimitée et de tels épandages risquent de polluer les sols récepteurs (Baize et coll., 2002) !
Traficabilité (possibilité de passage du matériel agricole et du gros bétail)
Si un sol est gorgé d’eau (pas seulement l’horizon de surface) il offre peu de résistance au passage du matériel agricole ou au piétinement du gros bétail. Il perd de sa portance. Il en résulte des risques d’embourbement des engins les plus lourds, l’apparition de tassements profonds et, en sols forestiers, des orniérages importants notamment lors des débardages, c’est-à-dire lors du transport des arbres abattus de la forêt jusqu’au lieu de chargement (Figure 4). Toutes ces dégradations structurales avec perte de porosité des horizons profonds sont souvent irréversibles, au moins à court et moyen terme. Elles ne sont pas toujours spectaculaires et peuvent s’installer insidieusement.
Il est donc important de conserver une macroporosité satisfaisante dans tous les horizons afin de maintenir la capacité naturelle du sol de se ressuyer verticalement. Si besoin, il faudra éliminer les excès d’eau par un assainissement adapté (drainage par tuyaux, fossés).
Habitat des lombrics
Les horizons profonds servent d’habitat aux vers de terre dits « anéciques » (ou « verticaux »). De grandes tailles, ils montent ou descendent continuellement en creusant des galeries. Pendant la nuit, ils viennent à la surface du sol, prélèvent la litière et l’entraînent en profondeur dans leurs galeries verticales. Inversement, ils remontent des matières jusqu’à la surface et construisent des turricules. Le réseau de leurs galeries peut être très dense dans les milieux à forte activité biologique. Les lombrics jouent un rôle pédogénétique et fonctionnel majeur, en rejetant à la surface du sol des matériaux organominéraux provenant des horizons inférieurs et en facilitant la circulation verticale de l’air et de l’eau dans des conduits de grande taille (plusieurs millimètres de diamètre).
Sous forêts, ils sont essentiels dans la formation des formes d’humus de type mull1, car ils assurent l’association rapide et intime des matières organiques avec les matières minérales, notamment les argiles, et ce dans les horizons de surface. Au contraire, ils sont absents dans les sols forestiers acides.
Stockage de carbone
En règle générale, les taux de matières organiques des trente premiers centimètres des sols sont importants (2 à 10 %) mais très dépendants de la nature de la végétation (forêt, culture, prairie, friche) et de la forme d’humus. En profondeur, ce taux décroît très rapidement. Dans les horizons inférieurs, le carbone organique, essentiellement d’origine racinaire (rhizodéposition1 + racines mortes + microflore bactérienne), présente généralement de faibles concentrations (0,1 à 0,4 %) mais sur des épaisseurs importantes, il ne doit donc pas être négligé. Il existe cependant des types de sols où l’on dose en profondeur des teneurs encore relativement élevées : par exemple les horizons BP des podzosols2 (Figure 6) ou des sols à caractère « clinohumique3 » (Figure 5).
Selon Derrien et coll. (2016), les apports souterrains d’origine végétale ont un rôle majeur sur le stockage du carbone dans les sols. Les matières organiques racinaires représenteraient environ un tiers de ces apports en milieu prairial et la moitié en milieu forestier. Contrairement aux litières aériennes qui sont plus ou moins rapidement minéralisées, les apports souterrains contribueraient très largement au stockage en profondeur de carbone sous des formes stables.
Les tourbières
Elles constituent un cas particulier d’accumulation constante de matières organiques végétales peu ou non décomposées dans un milieu gorgé d’eau. À partir du moment où le niveau de l’eau est abaissé pour permettre leur mise en culture, les matières organiques se minéralisent spontanément et on observe le déstockage du carbone et, à terme, la disparition de la tourbe. Les pédologues nomment histosols ces sols entièrement organiques.
Conclusion
La structure macroscopique (existence, dimensions et forme des agrégats ; dimensions, connectivité et arrangement des vides) demeure fondamentale pour tout ce qui concerne la circulation et le stockage de l’eau, l’aération et donc l’activité biologique dont dépendent le développement et la vie des racines des végétaux.
L’intérêt primordial d’un système racinaire profond, bien réparti et sain réside non seulement dans un bon ancrage et une bonne nutrition du végétal, mais surtout dans l’utilisation de la réserve en eau du sol, proportionnelle au volume prospecté. Celui-ci dépend de la répartition latérale des racines et non pas seulement des profondeurs atteintes.
C’est pourquoi nombre d’auteurs insistent sur l’importance concrète de la structure macroscopique des sols : « Le développement et le maintien d’une structure du sol désirable et optimale pour la croissance des plantes sont des exigences éternelles en agriculture » (Hillel, 1988). Et cela est valable sur toute l’épaisseur du sol, pas seulement pour l’horizon de surface remanié par les outils agricoles.
Références bibliographiques
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Baize D., Lamy I., vanOort F., Dère C., Chaussod R., Sappin-Didier V., Bermond A., Bourgeois S., Schmitt C., Schwartz C., 2002 – 100 years spreading of urban waste water on market-garden soils close to Paris (France) : subsequent impacts and hazards. 17th World Congress of Soil Science, Bangkok. Symposium 29, paper n° 204.
Concaret J. (coord.), 1981 – Drainage agricole. Théorie et pratique. Chambre régionale d’agriculture de Bourgogne, Dijon. 509 p.
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Dupraz C., 2009 – L’ascenseur hydraulique ou comment les arbres redistribueraient l’eau du sol. Agroforesteries, n° 02, pp. 13-18.
Hénin S., Gras R. et Monnier G., 1969 – Le profil cultural. Paris, Masson, 332 p.
Hillel D., 1988 – L’eau et le sol. Principes et processus physiques. 2ᵉ édition. Pédasup 5, Academia, Louvain-la-Neuve, 294 p.
Lucot E. et Bruckert S., 1992 – Organisation du système racinaire du chêne pédonculé (Quercus robur) développé en conditions édaphiques non contraignantes (sol brun lessivé colluvial). Annales des sciences forestières, INRA/EDP Sciences, 49 (5), pp.465-479. hal-00882815
Rowell D.L., 1994 – Soil Science : methods and applications. Longman Scientific & Technical. 350 p.