La comparaison des structures et organes de vision/photoréception chez divers organismes a été très révélatrice. Darwin avait déjà consacré plusieurs pages à détailler les étapes qui pouvaient avoir mené à cet organe complexe.

Quel avantage apporte un œil « partiel » ?

Les euglénophytes (comprenant l’euglène couramment trouvée dans les mares) sont des eucaryotes unicellulaires dont certains sont photosynthétiques. Ceux-ci possèdent une structure cellulaire photosensible, le stigma, situé près du flagelle, et sont capables de se diriger vers la lumière (ce qui peut présenter un avantage pour des espèces photosynthétiques).
D’autres eucaryotes unicellulaires possèdent des structures photosensibles, leur permettant d’orienter leur déplacement soit vers la lumière, soit à l’abri de celle-ci. Ainsi, une structure visuelle très simple, ne permettant de déterminer que la direction d’où provient la lumière, peut déjà procurer un avantage à ceux qui la possèdent.

Une origine multiple ou une origine commune ?

Certaines recherches récentes amènent à penser que tous les yeux des métazoaires ont une origine commune, malgré les différences importantes qui existent aujourd’hui.
Une très grande diversité existe dans la structure et le fonctionnement des yeux les plus complexes, et les organismes qui les possèdent ont probablement subi une évolution de cette complexité chacun de leur côté, même si ces organes visuels présentent parfois une certaine ressemblance superficielle. Ainsi en est-il des structures observées chez les arthropodes, les céphalopodes et les vertébrés, qui se sont complexifiées indépendamment, chacune de leur côté.

La structure des yeux des Octopodidae (pieuvres) présente une plus grande similitude dans son organisation (bien qu’il existe des différences notables) avec celle des yeux de vertébrés qu’avec celle des yeux composés des insectes, par exemple.

Or les mollusques sont plus proches phylogénétiquement des arthropodes que des vertébrés (ils ont divergé il y a plus longtemps des deutérostomiens, qui contiennent les vertébrés). Ce type de structure oculaire complexe a donc évolué deux fois indépendamment, d’un côté dans un groupe de mollusques, et de l’autre côté chez les vertébrés (voir figure ci-dessous).

Œil de calamar et œil de crocodile

À gauche : œil de calamar. Source : wildxplorer, CC BY, Wikimedia.
À droite : œil de crocodile. Source : Vassil, domaine public, Wikimedia.

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Mais même lorsque la forme et le fonctionnement des yeux des animaux diffèrent, ils partagent plusieurs caractères, tels l’implication du gène homéotique pax6 dans le démarrage de leur formation, l’intervention d’un pigment photosensible dérivé de la vitamine A, d’une opsine et d’une protéine G.

Comment peuvent évoluer des structures aussi complexes ?

Il existe des organismes possédant des structures semblables à la plupart des étapes hypothétiques de l’évolution des divers types d’yeux. Ainsi, l’objection que seul un œil complexe et entier est utilisable par les organismes peut être réfutée.

Cependant, ce n’est pas parce que certains organismes possèdent des structures qui correspondent à ce qu’auraient pu être les diverses étapes des évolutions de l’œil dans les différents groupes, que ces organismes possèdent réellement des yeux « ancestraux ». Ces structures ont pu évoluer parfaitement indépendamment, mais représentent des exemples intéressants de la façon dont les yeux « ancestraux » auraient pu fonctionner.