Des embryons synthétiques de souris cultivés ex utero

La recherche en biologie du développement s’appuie depuis toujours sur des embryons, dits  naturels, issus de la fécondation d’un ovule par un spermatozoïde. Récemment, des travaux menés sur des cellules souches embryonnaires en culture ont permis de reconstituer des structures présentant certaines similarités avec des embryons naturels. Ainsi, les gastruloïdes, constitués d’agrégats de cellules souches de souris, donnent lieu, comme chez les embryons naturels, à la mise en place des axes embryonnaires et à une brisure de symétrie. Néanmoins, chez ces gastruloïdes, la formation de ligne primitive n’a pas lieu. Cette dernière constitue une étape décisive du processus de gastrulation, lui-même essentiel à la mise en place du plan d’organisation de l’animal.

Dans des travaux publiés au mois d’août dans la revue Cell, une équipe de l’Institut Weizmann des sciences (Israël) montre qu’il est possible de produire, à partir de cellules souches embryonnaires, des embryons de souris, appelés synthétiques, aux caractéristiques bien plus proches des embryons naturels 1. Ces embryons synthétiques ont été cultivés ex utero jusqu’au début de l’organogenèse, un stade de développement correspondant au 8e jour de gestation2 (E8,5). Pour cela, les chercheurs ont utilisé un système de culture spécialement mis au point et qui leur avait déjà permis de cultiver des embryons naturels jusqu’au stade E11.

Même si des progrès restent à réaliser quant à la reproduction parfaite, par les embryons synthétiques, de toutes les caractéristiques des embryons naturels, et quant à la possibilité de prolonger la culture de ces embryons jusqu’à des stades plus tardifs, ces résultats sont prometteurs à plusieurs titres. Chez la souris, la production d’embryons synthétiques pourrait permettre de réduire le recours à l’expérimentation animale et offrir de bien meilleures possibilités d’observation, d’analyse et d’intervention expérimentale, du fait du développement ex utero. Chez l’être humain, les chercheurs de l’Institut Weizmann imaginent déjà l’obtention d’embryons synthétiques, non pas à partir de cellules souches embryonnaires, mais de cellules souches pluripotentes induites. De tels embryons synthétiques permettraient, en particulier, de modéliser certaines malformations développementales.

Des embryons synthétiques de souris cultivés ex utero jusqu'au stade E8,5

Trois types de cellules souches embryonnaires (ESC) sont mélangées : des cellules naïves (cellules bleues) et des cellules dans lesquelles les gènes Cdx2 (cellules rouges) et Gata4 (cellules vertes) sont exprimés transitoirement afin de provoquer la différenciation en trophectoderme et en endoderme primitif, respectivement. Grâce à un dispositif adapté, les embyrons synthétiques obtenus peuvent être cultivés jusqu'au stade de développement E8,5.

Auteur(s)/Autrice(s) : Tarazi et coll., 2022 Licence : CC-BY Source : Cell

AlphaFold détermine la structure de toutes les protéines connues

Le séquençage des protéines permet de déterminer leur structure primaire, c’est-à-dire l’ordre dans lequel s’enchaînent leurs acides aminés. C’est ainsi que la base de données Uniprot recense les séquences de quelque 200 millions de protéines.

Cependant la structure primaire d’une protéine ne dit rien sur sa structure tridimensionnelle, qui est pourtant celle qui est déterminante pour comprendre sa fonction. Traditionnellement, la structure tertiaire ou quaternaire d’une protéine est déterminée par cristallographie aux rayons X, par spectrométrie RMN ou par cryo-microscopie électronique. Ce sont ces techniques qui ont permis de résoudre la structure tridimensionnelle de nombreuses protéines.

En disposant, pour un grand nombre de protéines, à la fois de leur séquence et de leur structure, il est possible d’entraîner des intelligences artificielles afin de leur faire prédire des structures à partir de séquences. À ce jeu, le programme AlphaFold de DeepMind (une entreprise appartenant à Alphabet, la maison mère de Google) est à ce jour l’un des plus performants. Après avoir rendu ce programme libre d’accès l’année dernière, DeepMind franchit un nouveau cap en publiant sa base de données de structures protéiques 1. Accessible gratuitement, cette base contient les structures prédites des 200 millions de protéines dont la séquence est connue. D’après l’Institut européen de bio-informatique (EMBL-EBI), partenaire de DeepMind, environ 35 % des prédictions d’AlphaFold sont très précises, offrant des structures aussi fidèles que celles déterminées expérimentalement. 45 % des prédictions devraient être suffisamment précises pour de nombreuses applications. Enfin, pour les prédictions estimées comme peu fiables, elles pourraient en particulier concerner les protéines n’ayant pas de structure fixe ou qui n’acquièrent leur forme qu’en présence d’autres molécules.

Un champignon qui fait mouche

Fructifications d'Ophiocordyceps émergeant du corps d'une mouche
Auteur(s)/Autrice(s) : Roberto García-Roa Licence : CC-BY Source : BMC Ecology and Evolution

Les champignons du genre Ophiocordyceps parasitent des Arthropodes et modifient leur comportement en les forçant à se déplacer dans des endroits favorables à la croissance fongique. Le champignon se nourrit de son hôte pour finalement mettre en place des fructifications qui, en libérant des spores, permettront d’infecter de nouveaux hôtes. Ce cliché a été pris dans la jungle péruvienne par Roberto García-Roa et a remporté le premier prix du concours de photographie du journal BMC Ecology and Evolution 1.

La bipédie de Toumaï confirmée

Moulage du crâne holotype de Sahelanthropus tchadensis TM 266-01-060-1, surnommé Toumaï, en vue facio-latérale

Sahelanthropus tchadensis est une espèce connue à travers quelques fossiles, dont ce crâne, surnommé Toumaï.

Auteur(s)/Autrice(s) : Didier Descouens Licence : CC-BY-SA Source : Wikimedia

Âgé de 7 millions d’années, Sahelanthropus tchadensis est le plus ancien représentant connu de la lignée humaine. Découverte au Tchad en 2001, cette espèce est notamment connue grâce à un crâne presque complet, surnommé Toumaï 1. La position de son trou occipital était un premier argument en faveur de la bipédie de cette espèce.

Se fondant sur l’étude d’un fémur et de deux ulnas (cubitus), les auteurs d’une étude publiée dans Nature en août 2022 confirment la bipédie2 de Sahelanthropus, tout en montrant que cette espèce présentait également une locomotion arboricole 3.

Le prix IgNobel de biologie

Chaque année, les prix IgNobel récompensent les recherches qui font d’abord sourire, puis réfléchir. Cette année, le prix de biologie 2022 est attribué à deux chercheurs de l’université de São Paulo « pour avoir étudié si et comment la constipation affecte les perspectives d’accouplement des scorpions ». Plus d’explications dans ce fil du compte Twitter de Planet-Vie.

Le French Gut : un projet qui ne manque pas de selles

Savoir ce que les Français et les Françaises ont dans le ventre, tel est l’objectif du projet Le French Gut mené par l’Inrae. Pour cela, les selles de 100 000 volontaires seront collectées et analysées afin de déterminer la composition de leur microbiote. Grâce à ce programme d’ampleur, il sera possible de mieux comprendre les facteurs de variations du microbiote d’un individu à un autre ainsi que les perturbations de ces communautés microbiennes observables dans certaines maladies chroniques.

Et aussi…

La nouvelle émission scientifique de France Culture

Après plusieurs années de présentation de La Méthode scientifique, Nicolas Martin cède sa place à Natacha Triou pour la nouvelle émission scientifique de France Culture : La science, CQFD. Chaque jour, du lundi au vendredi, cette émission d’une heure traite d’un sujet d’actualité grâce au concours de deux spécialistes. Les émissions passées peuvent être écoutées sur l’application Radio France.

Le programme des cours du Collège de France pour l’année 2022-2023

Le Collège de France est célèbre pour les cours qu’il propose, dispensés chaque année par des spécialistes de leurs disciplines. Il est possible d’assister aux cours sur place ou d’attendre que les enregistrements soient mis en ligne. Dans les deux cas, l’accès aux cours est gratuit. Le programme des enseignements pour l’année 2022-2023 est désormais disponible. Plusieurs cours ont trait à la biologie, par exemple celui d’Hugues de Thé, Revisiter les bases biologiques de la chimiothérapie anticancéreuse, celui de Sonia Garel, Comment le système immunitaire surveille le cerveau ou encore celui de Jean-Jacques Hublin intitulé Reproduction et démographie chez les Hominines.

Le nouveau numéro du magazine de l’Inserm

Le dernier numéro du magazine de l’Inserm, accessible en ligne gratuitement, propose un dossier intitulé Conscience : la moduler pour mieux soigner.

Les résultats du concours Nikon Small World

Chaque année, le concours Nikon Small World récompense les plus belles photographies et vidéos prises à l’aide d’un microscope. La vidéo lauréate de cette année montre des cellules de la ligne latérale ainsi que des mélanocytes en migration dans un embryon de poisson-zèbre.

L’auteur remercie chaleureusement Patrick Charnay, Tommaso Villa et Jérémy Duveau pour leurs relectures respectives des articles : Des embryons synthétiques de souris cultivés ex utero, AlphaFold détermine la structure de toutes les protéines connues et La bipédie de Toumaï confirmée.