Dans le parc national de Yellowstone, les loups infectés par le parasite Toxoplasma gondii présentent un comportement plus « risqué » que les loups non infectés, ce qui pourrait faciliter la contamination de nouveaux hôtes par le parasite.
Toxoplasma gondii est un parasite intracellulaire obligatoire1 responsable de la toxoplasmose. Généraliste, il peut infecter divers organismes homéothermes, mais son hôte définitif lui permettant d’accomplir la partie sexuée de son cycle est nécessairement un félin. Dans le parc national de Yellowstone, ce sont les pumas (Puma concolor) qui constituent cet hôte définitif. Ce superprédateur partage une partie de son territoire avec d’autres carnivores, dont le loup gris (Canis lupus). Un suivi sérologique et observationnel sur 26 ans a permis de montrer une augmentation de la prévalence de la toxoplasmose chez les loups de Yellowstone, en particulier chez ceux qui partagent le plus de territoire commun avec les pumas 2. Cette proximité spatiale a pu favoriser le transfert du parasite par contact direct – consommation de viande de puma – ou indirect – ingestion d’oocystes du parasite libérés dans les urines et les fèces des pumas. Meyer et ses collègues de l’université du Montana ont montré par ailleurs une plus forte propension des loups infectés à exhiber des comportements risqués, tels le départ de la meute (« dispersers ») ou la lutte pour la dominance (« leaders »). Cette augmentation de la prise de risque pourrait favoriser la dissémination du parasite vers d’autres individus par reproduction des dominants, ou encore vers de nouveaux territoires par dispersion, et donc augmenter les chances du parasite de rencontrer son hôte définitif. De telles manipulations parasitaires du comportement ont déjà été décrites chez des rats, des hyènes ou des chimpanzés infectés qui montraient une plus grande proximité avec leurs prédateurs naturels félidés, respectivement des chats, des lions et des léopards. Il est probable que ces comportements soient pilotés par des bouleversements hormonaux, tels une augmentation de la sécrétion de testostérone favorisant l’agressivité et la témérité, et une altération de la perception du risque de prédation par des mécanismes anxiolytiques.