Dans le livre La folle histoire des virus, Tania Louis montre les limites à vouloir « classer ». Que ce soit dans les domaines de la physique, ce par quoi l’autrice débute, ou de la biologie. Les virus n’y échappent donc pas.

Les connaissances acquises sur les virus sont présentées dans un ordre chronologique, suivant l’histoire de la virologie. Les manipulations successives ayant permis la découverte des virus et leur caractérisation sont bien documentées. Le livre présente notamment la part importante jouée par Rosalind Franklin dans ces avancées, à travers son travail sur le virus de la mosaïque du tabac. Ce cadrage intéressant met en lumière que les travaux sur la structure de l’ADN pour lesquels Rosalind Franklin est mondialement célèbre n’ont constitué qu’un sujet secondaire dans sa vie de chercheuse, relativement à son travail sur le virus de la mosaïque du tabac.

L’ambiguïté de classer les virus dans le monde « vivant » ou non est posée rapidement. Au cours du livre, l’autrice oscille entre des formulations les attribuant dans l’un ou l’autre, ce qui peut paraître déroutant à la lecture. Son avis sur la question est ensuite donné lors d’un passage présentant une série d’arguments sur le caractère « vivant » ou non des virus. Si l'absence de métabolisme des virions peut constituer un argument en faveur du caractère non-vivant des virus, ne faudrait-il pas considérer que la forme vivante du virus est celle de la cellule parasitée, au fonctionnement détourné par le virus, appelée alors virocellule ? Dans cette perspective, les virions sont à envisager comme les formes de dispersion de la virocellule, et se trouvent dans le même état latent que les spores des champignons ou des plantes par exemple. Ces données sont passionnantes et permettent de prendre du recul sur ce qu’est un être vivant.

Les exemples classiques de la virologie sont repris dans cet ouvrage (virus de la mosaïque du tabac, bactériophages, VIH). De nombreuses pages sont consacrées aux syncytines et à l’évolution du placenta. À travers cet exemple illustrant le rôle des virus dans l’évolution des êtres vivants, l’autrice met un point d’honneur à éviter de les considérer comme des entités uniquement néfastes pour la santé. Idée mise de nouveau en avant à la fin du livre avec l’utilisation de bactériophages en médecine (phagothérapie).

Le livre s’adresse préférentiellement à un public ayant des connaissances relativement solides en biologie étant donné la technicité de certains points abordés. Ces connaissances sont nécessaires pour apprécier la complexité du monde viral, fort diversifié entre les virus de pluricellulaires, les virus de bactéries, les virus de virus, les virus sans capside ou enveloppe, les mégavirus...