La défense des milieux naturels s'appuie sur des considérations de différentes natures (intérêt scientifique, écologique, culturel, etc...) mais il n'est pas si fréquent d'avoir des estimations chiffrées sur l'intérêt économique qu'il peut y avoir à les préserver. C'est précisément ce que fait un rapport du PNUE (Programme des Nations Unies pour l'Environnement) qui entre autres informations, chiffre l'intérêt économique des mangroves et des récifs corraliens ramené au kilomètre carré (voir le communiqué de presse en français). Cette approche, qui peut sembler éloignée des préoccupations environnementales, permet cependant d'apporter un éclairage nouveau sur ces questions.
Citons quelques conclusions d'ordre général tirées du rapport :
- La valeur économique totale des récifs est estimée de $100.000 à $600.000 par kilomètre carré par an, alors que celles des mangroves s'élève à plus de $900.000 par kilomètre carré par an.
- En général, les poissons de récifs représentent un quart de la pêche mondiale, soit une source d'alimentation pour un milliard de personnes.
- Afin de [...] préserver (les récifs), il faut juste $775 par kilomètre carré par an, déduits des frais de gestion d'un parc marin.
et quelques exemples locaux :
- Les coûts d'installation de brise-lames artificiels faits de tétrapodes en béton autour de Malé, aux Maldives, s'élevaient à $10 millions par kilomètre. Ceci a été entrepris après la dégradation du récif naturel.
- En Indonésie, un hôtel dans l'ouest du Lombok a dépensé, en moyenne, $125.000 par an sur sept ans pour réhabiliter sa plage longue de 250 mètres, suite à l'érosion causée par l'exploitation du corail en mer.
- Une forêt de mangrove de 400 kilomètres carrés à Matang (Malaisie) produit une pêche d'une valeur de $100 millions par an.
- En 2000, les bénéfices annuels nets du tourisme de plongée dans les Caraïbes s'élevaient à un peu plus de $2 milliards, dont $625 millions rapportés directement par les activités de plongée dans les récifs.
Ces conclusions sont tirées de la publication intitulée "In the Front Line: Shoreline Protection and other Ecosystem Services from Mangroves and Coral Reefs" ("En première ligne : la protection du littoral et les autres services des écosystèmes rendus par les mangroves et les récifs coralliens"). Il a été produit par le Centre mondial de surveillance continue de la conservation de la nature du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE-WCMC) en collaboration avec le Réseau international d'action sur les récifs coralliens (ICRAN) et l'IUCN- l'Union mondiale pour la conservation de la nature.
Terminons par les mots de Klaus Toepfer, le directeur exécutif du PNUE "J'espère que les réalités financières contenues dans cette étude transformeront radicalement l'attitude et le comportement des gouvernements, de l'industrie, des autorités locales et des individus, de sorte qu'ils apprécient davantage et conservent mieux ce capital naturel ; afin qu'ils réfléchissent à deux fois à la pollution, aux changements climatiques, au développement peu raisonnable et à d'autres pratiques préjudiciables qui minent rapidement la base économique de tant de communautés côtières à travers le monde."