Les livres grand public sur les champignons se résument souvent à des guides de détermination pour la cueillette. François Le Tacon et Jean-Paul Maurice entendent montrer que ces êtres vivants jouent des rôles bien plus divers et importants que celui de finir dans nos assiettes !
Les champignons ne forment pas un groupe d’êtres vivants très populaire. Contrairement aux animaux, aucune émission de télévision ne leur est consacrée et, à l’inverse des plantes, il est plutôt rare que l’on en cultive volontairement chez soi… Cette désaffection pour les champignons provient peut-être aussi du fait que plusieurs d’entre eux sont toxiques. François Le Tacon, directeur de recherche émérite à l’Inra, et Jean-Paul Maurice, pharmacien, redorent le blason des champignons dans ce court ouvrage d’une centaine de pages.
Tout d’abord, la diversité des champignons ne peut se résumer à celle des espèces observables lors d’une promenade en forêt. Soulignons que la partie visible du champignon, le sporocarpe, n’est que la partie émergée (et reproductrice) de l’iceberg. L’essentiel est invisible pour les yeux, sous forme d’hyphes microscopiques formant un dense réseau souterrain. Dernier biais empêchant d’appréhender pleinement la diversité des champignons : ce sont essentiellement les Basidiomycètes (pleurotes, cèpes, bolets…) qui sont à l’origine des fructifications visibles en sous-bois. Seuls quelques Actinomycètes connaissent une certaine notoriété, car consommés (truffes et morilles).
Ces deux groupes de champignons, avec celui des Gloméromycètes, ont la particularité de former des mycorhizes avec les plantes terrestres. Ces associations symbiotiques ont probablement été de première importance pour l’adaptation à la vie terrestre de végétaux initialement aquatiques. Les champignons sont également impliqués dans une autre symbiose permettant la vie en milieu aérien de cyanobactéries et d’algues : les lichens. Ces organismes discrets mais omniprésents ont notamment un rôle important dans la fixation du diazote atmosphérique.
En plus de ce mode de vie symbiotique, les champignons peuvent également être saprophages. En dégradant la matière organique (et notamment la lignine), ils jouent un rôle fondamental dans le recyclage de la matière minérale. Les champignons peuvent également avoir un mode de vie parasite. Ils sont à l’origine de dégâts parfois considérables dans les cultures (mildiou de la vigne, mildiou de la pomme de terre1…) et dans les écosystèmes naturels (graphiose de l’orme due à Ophiostoma ulmi, chytridiomycose décimant les Amphibiens…).
Les utilisations faites par l’espèce humaine des champignons concernent essentiellement l’alimentation : pain, boissons alcoolisées, fromages… mais également quelques applications médicales avec, en particulier, les antibiotiques.
Tous ces aspects (rôles écologiques, biodiversité, utilisations par l’Homme…) sont traités dans cette Odyssée des champignons dont on ne saurait que recommander la lecture. On regrettera simplement qu’il soit fait mention dans la première partie de l’ouvrage à des concepts aujourd’hui abandonnés : champignons « supérieurs » (p. 13 et 14), êtres vivants « plus évolués » que d’autres (par exemple p. 40), fossile vivant (p. 21).
Notons pour finir qu'il est possible de consulter un extrait du livre sur le site de l'éditeur.