Gilles Camus
Table des matières
- Une étape de la transgenèse végéatle
- L'action des antibiotiques n'est pas limitée aux monde bactérien
1. Une étape de la transgenèse végétale
Dans le protocole de transgenèse d'un organisme végétal (voir "La transgenèse grâce à Agrobacterium tumefasciens") la sélection des cellules ayant intégré le transgène s'effectue sur un milieu de culture contenant un antibiotique, en tirant parti du fait que le vecteur comporte un gène de résistance à l'antibiotique utilisé en plus du gène d'intérêt. Dans ce cadre, seules les cellules ayant intégré le transgène pourront se développer en présence de l'antibiotique, et par la suite donner une nouvelle plante.
Mais n'est-il pas paradoxal d'utiliser un antibiotique alors que ceux-ci sont censés être des molécules agissant contre les bactéries ?
2. L'action des antibiotiques n'est pas limitée au monde bactérien
Ce qu'il est classique de dire, c'est que les antibiotiques sont utiles pour lutter contre les infections bactériennes mais pas contre les infections virales. En effet, les cibles de ces molécules sont spécifiques des bactéries et non des virus. Le meilleur exemple en est fourni par les molécules qui vont s'associer au ribosome bactérien, qui est différent du ribosome eucaryote, et ainsi bloquer spécifiquement la synthèse protéique de ces cellules (voir "La pénicilline. Découverte d'un antibiotique"). Les virus humains parasitant les cellules du corps, donc des cellules eucaryotes, ils ne sont pas touchés par l'utilisation d'antibiotiques.
En revanche, si par définition les antibiotiques sont des substances chimiques qui agissent sur des bactéries de manière ciblée, rien n'empêche qu'ils aient d'autres propriétés. En effet, même si les antibiotiques utilisés en médecine ont une sélectivité importante, il faut se rappeler que la plupart des médicaments ont des effets secondaires, y compris à dose thérapeutique, et peuvent même devenir toxiques à forte dose. De plus dans le cas de la transgenèse, on s'adresse au monde végétal et une même molécule peut être peu toxique pour les cellules animales (donc utilisable médicalement) mais beaucoup plus toxique pour les cellules végétales (donc utilisable en génie génétique végétal).
Un exemple classique concerne la kanamycine qui est bien un antibiotique, c'est à dire une substance ayant une action antibactérienne (dont le mode d'action passe par la liaison à la sous-unité 30S du ribosome bactérien), mais qui a non seulement des effets secondaires non négligeables chez l'Homme, mais surtout (pour ce qui nous intéresse) une action toxique sur les plantes en inhibant le développement des chloroplastes. La présence de kanamycine empêche donc les plantes (ou les cellules végétales) de se développer, sauf si un gène de résistance a été introduit dans celles-ci (gène codant pour une protéine, souvent une enzyme, qui va inhiber l'action de l'antibiotique). Ce gène de résistance a toutes les caractéristiques souhaitées pour être utilisé comme gène de sélection.
On peut donc bien utiliser un antibiotique pour sélectionner les plants résistants ayant intégré un vecteur contenant un gène de résistance à cet antibiotique, l'action antibactérienne de l'antibiotique (qui explique qu'on le classe dans cette catégorie) n'étant alors pas le but recherché.