Introduction

Le bois est un matériau aux multiples débouchés : habitat, chauffage, chemins de fer, pour ne citer que quelques exemples. Avec les préoccupations environnementales actuelles, le bois est re-devenu un matériau d’avenir car outre ses qualités intrinsèques (thermique, mécanique, esthétique, etc.), il s’agit d’une ressource renouvelable et son utilisation n’entraîne pas une augmentation du taux de CO2 atmosphérique, tout ceci à condition qu’il soit produit de manière durable.

En effet, cette ressource n’est pas hors de danger : la surexploitation et/ou la mauvaise gestion de l’exploitation des ressources forestières entraînent des conséquences négatives, au premier rang desquelles figurent la déforestation et la perte de biodiversité. On peut prendre la mesure du risque de perte de biodiversité avec la liste de la CITES des espèces d’arbres menacées.

La CITES (Convention in International Trade of Endangered Species of wild fauna and flora) est un traité international plus connu sous le nom de « Convention de Washington ». Les espèces appartenant à l’annexe I (voir plus loin) de cette convention sont menacées de disparition et sont donc interdites au commerce. Pour les espèces appartenant aux annexe II et annexe III, le risque de disparition n’est pas immédiat mais pourrait être entraîné par une exploitation non maîtrisée, elles nécessitent donc des autorisations spéciales pour leurs commercialisations.

Concernant la déforestation, la FAO (Food and Agricultural Organization, ou organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture) a publié une Évaluation des ressources forestières mondiales en 2020 (FRA2020).

Entre 1990 et 1999, 0,38% des surfces forestières mondiales ont disparu chaque année. « Compensées » (en surface mais pas en nature) par les plantations, les pertes nettes de surfaces forestières ont été de 0,22 % par an. Entre 2000 et 2005 les pertes nettes de surfaces forestières ont été légèrement inférieures à la période précédente, avec 0,18 % par an. Cela représente tout de même 7 317 000 ha de forêts en moins par an (l’équivalent d’environ la moitié de toutes les forêts françaises), soit 20 046 ha par jour ou 1 ha toutes les 4,3 secondes. Les conséquences sont nombreuses et touchent aussi bien au climat qu’au développement économique et social des pays concernés.

C’est dans ce contexte, et alors qu’émergeait le principe de développement durable lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro (Brésil, juin 1992), que s’est développée l’idée d’une certification de l’exploitation des ressources forestières dans le respect de bonnes pratiques qui a pris le nom d’écocertification.

Qu’est-ce qu’une certification ?

Une certification est un acte volontaire dans lequel une entité demande à un organisme tiers, l’organisme certificateur, de donner une assurance écrite qu’un système d’organisation, un processus, une personne, un produit ou un service est conforme à des exigences spécifiées dans une norme ou un référentiel. Ce n’est donc pas l’un des intervenants de la chaîne de fabrication/commercialisation qui se charge de cette tâche, évitant d’être juge et partie.

Il est important d’avoir à l’esprit qu’une certification n’est pas un gage de qualité supérieure en soi, mais seulement un gage de respect de règles édictées. Son intérêt dépend donc des normes ou du référentiel utilisé. Bien entendu, l’obtention d’une certification a pour vocation d’être affichée afin de permettre au consommateur d’orienter son choix, s’il le désire, sur les produits/services certifiés.

Pour que cette organisation fonctionne, la confiance est essentielle (confiance du consommateur envers la certification, de l’entité qui demande la certification envers l’organisme certificateur, etc.). Les pouvoir publics interviennent donc pour s’en assurer à travers un dispositif, fixé par le Code de la consommation (articles L 115-27 à L115-33 et R115-1 à R 115-12), qui vise à instaurer la confiance à travers la transparence et l’accréditation.

Signalons enfin qu’il faut différencier la certification de la démarche du « label » tout court (hors du domaine agricole ou alimentaire) ou « contrôlé par un organisme indépendant ». En effet ces dernières pratiques ne sont pas encadrées par des dispositions réglementaires. Elles restent cependant licites tant qu’elles n’induisent pas de confusion avec une véritable certification dans l’esprit du public.

Les systèmes d’écocertification

La spécificité de l’écocertification est d’attester non seulement de la légalité du bois (on estime que certains pays exportent jusqu’à 80 % de bois illégal, essentiellement des bois exotiques) mais également de la qualité de la gestion forestière durable. L’écocertification correspondant à une certification de produits, pour que ce produit soit certifié il faut que toute la chaîne en amont le soit également ; de la forêt dont est issu le bois aux différents intermédiaires (en particulier les industriels qui transforment le bois). En pratique, cela revient à combiner deux certifications :

  • la certification de gestion forestière durable ;

  • la certification de traçabilité ou certification de la chaîne d’approvisionnement et de transformation.

Les quatre principaux systèmes de certification dans le monde sont :

  • FSC (Forest Stewardship Council, ou conseil de gestion forestière) ;

  • PEFC (Programme for the Endorsement of Forest Certification schemes, ou programme de reconnaissance des certifications forestières) ;

  • SFI (Sustainable Forestry Initiative, ou initiative pour une sylviculture durable) ;

  • CSA (Canadian Standard Association, ou association canadienne de normalisation).

À l’origine de ces labels de certification se trouvent des organisations non-gouvernementales internationales. Les labels d’écocertification SFI et CSA étant d’origine nord américaine, on ne trouve essentiellement en France que des produits labellisés FSC ou PEFC.
Le point commun entre ces deux derniers labels est de garantir des bonnes pratiques d’exploitation forestière, respectueuses de l’environnement et assurant la pérennité de la ressource.
La principale différence concerne la présence d’un important volet socio-économique dans les critères du FSC qui en fait l’écocertification la plus stricte actuellement.

Le mouvement d’écocertification est assez récent puisque le plus ancien système, FSC, a été créé en 1993 juste après le Sommet de la Terre. PEFC n’a été créé qu’en 1999, et seulement à l’échelon européen (il s’appelait alors Pan European Forest Certification Scheme, ou schéma de certification de la forêt paneuropéenne) et ce n’est que le 31 octobre 2003 qu’il est devenu mondial, prenant sa dénomination actuelle pour l’occasion.

Les forêts écocertifiées sont donc encore très minoritaires puisqu’elles ne représentent qu’environ 8 % des surfaces forestières mondiales en 2008 (soit 300 millions d’hectares écocertifiés sur 3,9 milliards d’hectares) mais déjà environ 33 % en France, soit près de 4,5 millions d’hectares sur 15,5 millions d’hectares (voir le tableau ci-dessous).

Les deux principaux systèmes d'écocertification

À gauche, logo du système d'écocertification FSC. À droite, logo du système d'écocertification PEFC.
 

 

Implantation des deux principaux systèmes d’écocertification
 

FSC

 

PEFC

 

Implantation mondiale

94 millions d’ha

85 % en zone tempérées/boréales

15 % en zone tropicale

204 millions d’ha
environ 60 millions d’ha PEFC sensus stricto
environ 135 millions d’ha reconnus PEFC (SFI / CSA / ATFS / Keurhout)

Essentiellement en zone tempérées/boréales

Implantation nationale

15 000 ha

4,35 million d’ha

Les différences s’expliquent par le fait que le système FSC a été initialement développé pour les bois exotiques, alors que le système PEFC s’est récemment étendu au monde entier, d’où une implantation plus importante de FSC en zone tropicale.
L’autre paramètre est l’importance de la reconnaissance mutuelle pour PEFC (voir les « Les limites actuelles »).

Les limites actuelles

L’écocertification se heurte actuellement à plusieurs problèmes : le coût, la diffusion et les reconnaissances mutuelles.

Le coût

L’écocertification a un coût qui n’est pas négligeable (jusqu’à 10 à 20 % de prix en plus). N’étant pas encore très connue, elle ne constitue pas forcement un argument pour justifier la différence de prix auprès des consommateurs. Les solutions passent par une réduction du coût de l’écocertification à un niveau « acceptable », et par l’information des consommateurs.

La diffusion

En effet, même si cette démarche n’est pas encore très connue, la demande est déjà plus forte que l’offre. Ceci est vrai en particulier pour les bois exotiques, car le pourcentage de surfaces écocertifiées de forêts tropicales (dont sont issus les bois exotiques) restent très faibles comparativement aux forêts tempérées/boréales (voir tableau ci-dessous).
Ainsi sur les 300 millions d’hectares écocertifiés, 5 % seulement le sont sur les continents abritant des forêts tropicales. Pourtant, les forêts tropicales couvrent une surface équivalente à celle des forêts tempérées/boréales.

Proportion des surfaces forestières écocertifiées en fonction des continents.

Continent

Surface forestière écocertifiée
(en %)

Europe

56

Amérique du Nord

39

Amérique du Sud

2

Asie

2

Afrique

1

On constate que deux continents se distinguent, à savoir l’Europe et l’Amérique du Nord. Cela est à mettre en relation avec l’existence de systèmes d’écocertification spécifiques (CSA pour le Canada, SFI pour l’Amérique du Nord, PEFC initialement développé pour l’Europe) et avec le fait que les exploitations de ces zones sont plus faciles à écocertifier, s’agissant de forêts souvent en extension.

Cependant, on peut remarquer que la situation évolue très rapidement. L’exemple de la France est ainsi parlant : en 10 ans, 33 % de sa surface forestière ont été écocertifiés PEFC. Et concernant les forêts tropicales, la situation évolue également. PEFC était encore récemment strictement limité aux forêts tempérées/boréales, mais depuis peu, les schémas nationaux du Brésil, du Gabon, de la Malaisie ou du Chili sont reconnus par PEFC. On peut donc espérer voir un essor rapide de l’écocertification pour les forêts tropicales.

Les reconnaissances mutuelles

C’est peut être le plus important et le plus délicat problème à régler. La reconnaissance mutuelle consiste à afficher des produits écocertifiés selon un label d’écocertification sous un autre label, sous réserve qu’une reconnaissance mutuelle existe entre les deux.
Le problème vient du fait que toutes les ONG ne sont pas d’accord sur les labels à reconnaître. En effet, l’écocertification prenant naissance dans des règles édictées par des ONG diverses, différents systèmes d’écocertification sont apparus, dont certains semblent n’être qu’un voile de fumée sur des pratiques qui n’ont rien de durables.
PEFC est en particulier régulièrement dénoncé pour avoir des accords de reconnaissance mutuelle avec des labels d’écocertification jugés trop laxistes par d’autres ONG telles le WWF (World Wild Found) ou Greenpeace, et bien entendu par FSC.
On peut citer pour exemple la controverse à propos de Keurhout. Il s’agit d’un label originaire des Pays-Bas, créé en 1997, et dont l’existence a déjà été mouvementée. La fondation qui en était à l’origine a fait faillite en 2004 et a été reprise par la fédération hollandaise des importateurs de bois tropicaux (WNH). Les produits écocertifiés Keurhout peuvent donc être commercialisés sous le logo PEFC, sans distinction par rapport aux produits écocertifiés selon les critères PEFC propres.
Cette situation n’est pas marginale puisque plus des deux tiers des surfaces forestières labellisées PEFC le sont par reconnaissance mutuelle (voir tableau 1). Cette situation est préjudiciable, car elle entraîne non seulement une multiplication des affichages qui nuisent à la diffusion et à la lisibilité de la démarche, mais plus encore ces controverses peuvent porter atteinte à sa crédibilité. Pour le moment, aucun consensus n’a été trouvé, même si nombreux sont ceux qui souhaiteraient une harmonisation et un affichage unique.

Conclusion

L’écocertification n’est pas la panacée pour lutter contre les dangers qui menacent les forêts et ceci pour plusieurs raisons. D’abord elle n’agit pas sur les conditions d’exploitation des forêts mais vient seulement récompenser ceux qui ont fait la démarche d’aller vers des pratiques plus tournées vers l’avenir. D’autre part, elle ne concerne que la partie exploitation de la forêt, qui est minoritaire dans les causes de déforestation puisque 85 % des surfaces déboisées le sont pour l’agriculture et l’élevage.
Cette démarche permet cependant de maintenir un climat favorable à la prise de conscience de l’importance écologique, mais aussi économique et sociale, de la forêt et de l’intérêt d’une gestion de cette ressource qui n’hypothèque pas l’avenir.

À lire également

Annexe I de la CITES

Espèces végétales risquant de disparaître qui sont ou peuvent être menacées par le commerce. Commerce bois en annexe 1 interdit. Dans quelques cas exceptionnels, leur commerce est admis sous réserve d’un permis d’importer délivré par le pays importateur mais aussi d’un permis d’exporter délivré par le pays concerné.

Nom scientifique

Noms communs commerciaux usuels

Pays d’origine

Fitzroya cupressoides

Alerce

Amérique du Sud, entre 39 et 43° de latitude sud

Pilgerodendron uviferum

Pilgerodendron

 

Araucaria nigra

Pin du Chili

Chili essentiellement, Nouvelle-Zélande et USA.

Araucaria araucana

Monkey Puzzule tree / Araucaria du Chili – Désespoir du singe

Amérique du Sud, chili et argentine.

Dalbergia nigra

Palissandre de Rio, Brazilian Rosewood

Brésil

Abies guatemalensis

Guatemalan Fir / Sapin du Guatemala

Guatemala, Mexique, Salvador, Honduras

Podocarpus parlatorei

Parlatore's Podacarp / Podocarp d’argentine

Argentine, Bolivie, Pérou.

Balmea stormiae

 

Guatemala, Mexique.

Annexe II de la CITES

Concerne les espèces qui peuvent devenir menacées si leur commerce n’est ni contrôlé ni suivi. Commerce autorisé mais nécessite un permis d’exporter du pays d’origine ou de réexporter. Permis accordés uniquement aux essences légalement déterminées et dont l’exportation ne se fait pas au détriment de leur survie.

Nom scientifique

Noms communs commerciaux usuels

Pays/région d’origine

Pterocarpus santalinus

Santal rouge / Redsanders

Inde

Gualacum officinale, Gualacum sanctum

Gaïac

Amérique centrale et du Sud

Swietenia mahogani

Acajou d’Amérique

États-Unis, Antilles

Swietenia humilis

Mexican Mahogany / Acajou de la côte Pacifique / Mogo / Acajou des Antilles.

Guatemala, Mexique, Salvador, Honduras, Nicaragua, Costa Rica.

Pericopsis elata

Afromorsia ou Assamela

Cameroun, Côtr d’Ivoire, Congo, Ghana, Nigeria, Zaïre

Podophyllum hexandrum

Podophylle

Inde, Himalaya

Caryocar costaricense

Aji, Ajo, Cariocar de Costa Rica

Costa Rica, Panama, Venezuela, Colombie.

Oreomunnea pterocarpa

Caribbean Walnut / Gavilan

Costa Rica, Mexique, Panama.

Platymiscium pleiostachyum

Quira Macawood / Cristobal / Granadillo.

Costa Rica, Salvador, Nicaragua.

Aquilaria malcaccensis

Agarwood, Aloewood

Inde, Birmanie, Thaïlande, Laos, Vietnam.

Prunus africana

African Cherry / Red Stinkwood

Afrique tropicale, Madagascar, Comores

Chrysalidocarpus decipiens

 

 

Neodypsis decaryi

 

 

Taxus wallichiana

Himalayan yew

Afghanistan, Chine, Inde, Malaisie, Birmanie, Népal, Pakistan, Vietnam.

Swietenia macrophylla

Mahogany grandes feuilles / Acajou du Brésil / Acajou d’Amérique / Véritable Acajou

Amérique du sud

Annexe III de la CITES

Contient toutes les essences sujettes à une régulation au sein des pays producteurs pour lesquels la coopération d’autres parties est recherchée en vue de contrôler le commerce. Un permis d’exportation ou une attestation d’origine sont requis pour ces essences.

Nom scientifique

Noms communs commerciaux usuels

Pays/région d’origine

Magnolia hodgsonii

Magnolia

Népal

Podocarpus neriifolius

Podocarp

Népal

Cedrela odorata

West Indian Cedar / Cèdre rouge / Cèdre d’Amérique

Pérou, Colombie, Mexique, Caraïbes.

Dipteryx panamensis

Almendro / Almond tree

Costa Rica

Gonystylus spp (27 espèces)

Ramin

Indonésie, Malaisie.