Marc-André Selosse, professeur au Muséum national d’histoire naturelle, et déjà auteur en 2000 de La symbiose, publie cette année un nouvel ouvrage : Jamais seul. Derrière ce titre, il s’agit de montrer que les êtres vivants ne sont pas des entités isolées, indépendantes les unes des autres mais qu’elles entretiennent en permanence des interactions. La symbiose, c’est cette vie ensemble. L’auteur se focalise ici sur les symbioses mutualistes, où chacun des partenaires bénéficie de cette association et plus particulièrement sur le rôle des microbes dans ces symbioses.

Jamais seul est organisé en treize chapitres : trois sont consacrés aux symbioses des végétaux, cinq à celles des animaux dont deux à celles de l’espèce humaine. L’auteur présente ensuite des endosymbioses anciennes – celles des plastes et des mitochondries – avant de discuter des mécanismes de maintien des associations symbiotiques au cours du temps. Il est ensuite question des conséquences des symbioses sur le fonctionnement des écosystèmes avant de terminer sur le rôle des microbes dans l’alimentation humaine (pain, fromage, vin…).

L’ouvrage intéressera l’enseignant de SVT en ce qu’il lui permettra d’approfondir ses connaissances sur des symbioses « classiques » : mycorhizes, lichens, nodosités et autres coraux pour n’en citer que quelques-unes. Le lecteur découvrira également des symbioses généralement moins connues comme l’association entre le calmar Euprymna scolopes et les bactéries luminescentes Aliivibrio fischeri.

Mais les exemples de symbioses présentés ne constituent pas le seul intérêt de l’ouvrage. Ces études de cas permettent en réalité de faire émerger les propriétés communes à de nombreuses symbioses. On se rend ainsi compte que ces associations étroites entre espèces permettent, par exemple, de coloniser des milieux pauvres en nutriments, à l’image de ces lichens capables de pousser sur des roches nues ou de ces coraux se déployant dans des eaux pauvres en nutriments. C’est la réunion des partenaires qui permet l’apparition de propriétés émergentes que chaque espèce, seule, ne possède pas. Ces associations symbiotiques transforment ainsi les propriétés des êtres vivants, que ce soit dans leur fonction de nutrition, de reproduction ou de relation.

Marc-André Selosse corrige également dans son ouvrage quelques croyances fausses : non, les vaches ne sont pas herbivores mais microphages ; non, les poils absorbants ne constituent pas la principale source d’apports minéraux des plantes — ce sont les mycorhizes, bien entendu…

En refermant Jamais seul, le lecteur sera convaincu, s’il y en avait encore besoin, que les associations symbiotiques irradient le vivant et que l’enseignement de la biologie nécessite de souligner l’importance de ces interactions. Pour les candidats au Capes ou à l’agrégation, l’ouvrage fournira quantité d’exemples pour illustrer des leçons. Les conclusions de fin de chapitre, d’une à deux pages, et résumant les idées essentielles, pourront également constituer de bons outils de révision. Il faut également souligner l'intérêt pour les enseignants des courtes vidéos publiées dans le cadre de l'ouvrage.

Si l’ouvrage se veut très accessible, grâce à l’emploi d’un vocabulaire simple, et à un style très clair, riche en métaphores bien pensées, deux regrets pourront être formulés pour le public enseignant. D’une part, il est dommage qu’il n’y ait pas d’illustrations, qui permettraient de montrer simplement des éléments parfois difficiles à décrire avec des mots uniquement (que l’on pense à l’anatomie des ecto et des endomycorhizes par exemple). D’autre part, des références indexées dans le texte permettraient de retrouver facilement les publications à l’origine des résultats présentés dans l’ouvrage, références utiles pour un enseignant qui souhaiterait aller plus loin dans la lecture, extraire des images pour illustrer un cours, construire des devoirs, etc.

La richesse de l’ouvrage, la clarté de son propos et la force de ses concepts font de Jamais seul un livre à ne pas manquer pour tous les passionnés de biologie.

Pascal Combemorel remercie les éditions Actes Sud pour lui avoir mis à disposition un exemplaire du livre.