Il fut un temps, pas si lointain, où l’homme occupait le sommet de l’arbre de l’évolution, où Neandertal était considéré comme une brute idiote, ou la néolithisation était envisagée comme une révolution, transformant en peu de temps, et de manière uniforme, des chasseurs cueilleurs nomades en agriculteurs sédentaires.

Si toutes ces visions n’ont plus cours aujourd’hui, c’est en partie grâce au développement des campagnes de fouilles, à la découverte de nouveaux fossiles et à la mise au point de nouvelles techniques d’investigation. En augmentant la quantité de faits collectés, il est ainsi possible de préciser les interprétations quant aux modes de vie de nos ancêtres, aux territoires occupés, aux objets produits ou encore aux cultures développées.

Cependant, ce que montre Claudine Cohen, philosophe et historienne des sciences, c’est aussi l’empreinte de nos préjugés dans la reconstitution de notre passé. Cette reconstruction a ainsi été compromise par différents a priori, comme la croyance qu’Homo sapiens est forcément supérieur aux autres espèces, que l’homme blanc est nécessairement meilleur que l’homme noir, que les femmes ne pouvaient évidemment pas prendre part à des activités considérées comme typiquement masculines (par exemple la chasse). Plus généralement, la reconstitution de l’histoire de nos ancêtres a été entachée de racisme, de sexisme, mais également influencée par le libéralisme, le communisme… Autrement dit, la pensée des chercheurs et chercheuses, quelle que soit leur discipline, mais peut-être encore plus en paléoanthropologie, s’inscrit dans un contexte historique, sociologique, politique et, cela va sans dire, scientifique, qui conditionne, au moins en partie, leurs interprétations des faits collectés sur le terrain ou en laboratoire.

La lecture de Nos ancêtres dans les arbres permet d’enrichir ses connaissances sur différentes facettes de l’histoire humaine : relations entre espèces, scénarios d’hominisation, évolution des cultures, places des hommes et des femmes… Étant donné l’aspect synthétique des chapitres, de dix à quinze pages chacun, d’autres sources seront bien entendu nécessaires aux lecteurs et lectrices souhaitant approfondir les notions abordées. À cet effet, de nombreuses notes et références bibliographiques terminent l’ouvrage. Enfin, soulignons que les conclusions des chapitres sont, de part leur clarté, leur aspect synthétique et les perspectives qu’elles ouvrent, un motif suffisant à la lecture de ce livre !