Objectifs

Objectifs cognitifs

  • Les rayons ultra-violets engendrent des mutations.
  • Une mutation peut engendrer un changement de couleur de la levure qui devient blanche. Elle peut aussi atteindre des gènes fondamentaux à la survie de la levure.

Objectifs techniques

  • Travailler en microbiologie en toute sécurité.
  • Manipuler en conditions stériles.

Recommandations importantes sur la sécurité en microbiologie

Faire pousser des levures de bière n’est pas un acte dangereux, sinon il y a bien longtemps que nous ne mangerions plus de pain. Cependant, il faut savoir que le milieu utilisé et que les conditions de culture des levures peuvent convenir à d’autres microbes moins « sympathiques ». Or nos élèves sont en situation d’apprentissage, ils vont donc effectuer tout à fait normalement des erreurs de manipulation, sources de contamination. Il est donc nécessaire de fermer toutes les boîtes de Pétri après ensemencement et action des ultra-violets, à l’aide de ruban adhésif ou bien de film étirable paraffiné.
Après observation des résultats, les boîtes de Pétri sont installées dans des sacs plastiques spéciaux (en vente chez nos fournisseurs habituels) supportant la chaleur et passées à l’autoclave ou dans la cocotte-minute (20 minutes de rotation de la soupape) pour stérilisation. Ces sacs peuvent être ensuite jetés sans danger dans la poubelle.
Il est important d’informer nos élèves de ce travail de destruction afin de les préparer à leur vie d’adulte citoyen, qui trie ses déchets avant de les mettre à la poubelle.
Si on souhaite être encore plus rigoureux, il existe des bandes de papier témoin dont une partie change de couleur si le chauffage a été suffisant et qui attestent que la stérilisation est bien faite. On glisse cette bande dans le sac plastique avant de le nouer. Ces bandes sont en vente chez les fournisseurs des sacs. C’est pour nos élèves une bonne formation pratique à la rigueur expérimentale.

Matériel

Le matériel proposé est celui qui convient à un établissement scolaire ne possédant plus d’alimentation en gaz dans les classes. On peut également prendre des pipettes Pasteur en verre et produire soi-même les râteaux à ensemencer, si on dispose de gaz.

  • Une souche de levure rose ADE2 (1 clone de 1 mm en suspension dans 1mL d’eau stérile).
  • Des boîtes de Pétri jetables contenant du milieu YPG (voir fiche technique).
  • Des râteaux à ensemencer jetables sous emballage stérile.
  • Des pipettes compte-goutte de 1 mL jetables sous emballage stérile
  • Une hotte à UV (voir fiche technique).
  • Des couvercles de boîte de Pétri dont un quart a été ôté à l’aide d’un cutter (sous les UV).
  • Des champs stériles (quelques serviettes jetables ou quelques feuilles de papier ménage enfermées dans une feuille de papier d’aluminium et passées à l’étuve sèche à 130 °C durant au moins 30 minutes). Entre les feuilles du champ stérile on peut installer des outils stériles sans qu’ils se contaminent. Ils permettent de travailler sans flamme en conditions stériles.
  • Scotch ou film étirable paraffiné (parafilm par exemple).
  • Un distributeur de savon liquide.
  • Une pissette d’alcool.
  • Un produit ménager pour nettoyer les paillasses.

Les masques ne sont pas vraiment nécessaires, mais ils peuvent aider les élèves à entrer psychologiquement dans la peau du scientifique qui travaille en conditions stériles. Le mieux est de les jeter après usage, mais on peut réutiliser ces masques à condition de les stériliser à l’étuve sèche.

Activités envisageables pour les élèves

Mettre en culture des levures roses exposées aux radiations ultra-violettes

Lorsqu’on travaille en conditions stériles, chaque geste doit être anticipé de façon à ne pas se retrouver dans une situation contaminante.
Les paillasses ont été lavées et passées à l’alcool à l’aide de papier ménage.

  1. Se désinfecter les mains. Ôter les bagues, laver soigneusement les mains au savon, les passer à l’alcool.
  2. Prendre une boîte de Pétri contenant un milieu nutritif pour les levures (YPG). Sans l’ouvrir indiquer sur le côté de la boîte à l’aide du stylo feutre spécial votre nom et tracer sur le fond de la boîte quatre quarts en inscrivant sur le côté de chacun des secteurs : 0, 30, 45, 80.
  3. Ouvrir l’emballage de la pipette stérile. Prélever un peu de suspension de levures après les avoir bien agitées.
  4. Déposer 2 gouttes de suspension de levures au milieu de la boîte de Pétri maintenue entrouverte le moins longtemps possible. Remettre la pipette dans le champ stérile.
  5. Étaler les levures avec un râteau de plastique stérile en maintenant le couvercle entrouvert jusqu’à ce que la surface de la boîte soit sèche (les levures entrent dans la surface d’agar, sinon elles coulent lors du déplacement de la boîte et leur répartition n’est plus homogène). Toute la surface de la boîte doit être régulièrement « ratissée ».
  6. Transporter la boîte sous la hotte à UV, ôter son couvercle et le remplacer par un couvercle réduit aux 3/4.
  7. Le plastique étant opaque aux UV, exposer chaque quart. Le 1/4 noté 30, 30 secondes aux UV, le 1/4 noté 45, 45 secondes aux UV, le 1/4 noté 80, 80 secondes aux UV
  8. Refermer la boîte avec son couvercle complet, la sortir de la hotte, la scotcher, la porter dans l’incubateur à 30 °C.

Lecture des résultats

Résultats d'une culture de levure ade selon la durée d'exposition aux UV
Auteur(s)/Autrice(s) : Marie-Jeanne Pellerin Licence : Pas de licence spécifique (droits par défaut)

Lors de la lecture des résultats on peut s'intéresser au nombre de clones (colonies), ou à la proportion de clones blancs, observé en fonction du temps d'exposition aux UV.  Ces données peuvent être facilement converties sous forme de graphes (voir ci-dessous).

Représentation graphique des résultats d'exposition de levures ade aux UV

Le graphique de gauche représente le nombre de clones observés en fonction du temps d'exposition aux UV. On note une diminution de ce nombre en fonction de la durée d'exposition.

Le graphique de droite représente, en fonction du temps d'exposition aux UV, la proportion (pourcentage) de clones blancs parmi tous ceux comptés. On note que cette proportion augmente avec la durée d'exposition.

Auteur(s)/Autrice(s) : Marie-Jeanne Pellerin Licence : Pas de licence spécifique (droits par défaut)
  1. Le quart noté 0 a-t-il été exposé aux UV ?
  2. Schématiser les résultats puis les traduire par une phrase.
  3. Proposer des hypothèses expliquant ces résultats.

Interprétation de l’effet des ultra-violets sur les levures roses

  • Observations préliminaires

Composition du milieu de croissance des levures YPG

Extrait autolytique de levures (Yeast extract)

10 g

Peptones (mélange d’acides aminés)

10 g

Glucose

20 g

Agar

17 g

Eau distillée

1 L

Q : Déduisez de la composition de ce milieu si les levures sont autotrophes ou hétérotrophes.

Q : Ce milieu contient-il une substance rose ?

  • Résultats de l’expérience du TP

Sans traitement aux UV des levures blanches apparaissent spontanément dans la boîte.

Q : Quel pourcentage de clones blancs avez-vous obtenus ?

Le pourcentage de levures roses augmente dans les secteurs soumis aux UV.

Q : Quel pourcentage maximum avez-vous obtenu ?

  • Comment les radiations UV agissent-elles sur des molécules ?

Les radiations UV véhiculent de l’énergie. Lorsqu’une radiation a une action sur une molécule, elle est absorbée par la molécule. Le résultat de cette absorption est une modification de la molécule par cet apport d’énergie. Une molécule modifiée peut perdre ses propriétés.

Q : Proposez une représentation schématique de ce texte.

  • Le problème scientifique.

Par quel mécanisme se fait  l'augmentation de la proportion des clones de levures blanches ?

  • Hypothèses.

Notez vos hypothèses sur votre fiche puis confrontez-les à celles de l’ensemble de la classe.

  • Expérience.

On extrait des levures les molécules organiques suivantes : protides, lipides, glucides, ADN.
On mesure expérimentalement lesquelles de ces molécules absorbent le rayonnement UV de 254 nm.
On constate qu’il s’agit de l’ADN.

  • Interprétation de l’expérience
  • Conclusion générale.

Schéma de synthèse résumant l’effet des UV sur les cellules de levures

En partant du dessin de levure proposé, construire un schéma de synthèse montrant l’effet des UV sur la souche de levure rose. L’ADN des levures est réparti en 16 morceaux : les chromosomes de la levure.

Fiche technique mutagenèse chez une souche de levure rose ADE 2I

Caractéristiques et mode de culture de la souche utilisée

La souche ADE2 possède un gène défectueux dans la chaîne de biosynthèse de l’adénine. Il s’agit du gène qui transforme un produit intermédiaire de teinte rose l’amino-imidazole ribotide (AIR).

Chaîne de biosynthèse de l’adénine

PRPP : phosphoribosyl pyrophosphate, PRA : 5-phosphoribosylamine, GAR : glycinamide ribotide, FGAR : formyl glycinamide ribotide, FGAM : formyl glycinamidine ribotide, AIR : phosphoribosyl aminoimidazole, CAIR : 5- amino 4- carboxyimidazole ribotide, SAICAR : 5-amino 4-succinocarboxyimidazole ribotide, AICAR : 5-amino 4-carboxamide imidazole ribotide, FAICAR : 5-formamido 4-carboxamide imidazole ribotide, IMP : inosine monophosphate, ADS : adénylo succinate, AMP : adénosine monophosphate, ATP : adénosine triphosphate.

Auteur(s)/Autrice(s) : Marie-Jeanne Pellerin Licence : Pas de licence spécifique (droits par défaut)

Cette souche mute spontanément et forme des clones blancs. Il s’agit d’une mutation reverse c’est-à-dire qui ramène la levure à sa situation avant la mutation rose.
Le passage aux UV a un effet létal mais augmente aussi le taux de mutation reverse (voir plus loin).
On fait pousser cette souche à 30 °C sur un milieu YPG (Yeast, Peptones, Glucose, voir tableau 2).

Composition du milieu pour un litre de YPG

Extrait autolytique de levures (Yeast extract)

10 g

Peptones

10 g

Glucose

20 g

Agar

17 g

Eau distillée

1 L

Stériliser 20 minutes à 120 °C ou porter à ébullition au four micro-ondes 2 minutes. Couler en boîte de Pétri, laisser sécher les boîtes, les stocker à l’envers dans un récipient fermé dans un placard ou au réfrigérateur si on veut les stocker plus longtemps.

Les mutations observées

Les effets biologiques des UV sont multiples et complexes. Très souvent l’irradiation entraîne la mort des cellules par dénaturation de leurs protéines et apparition de produits toxiques (peroxydes). C’est un effet létal immédiat.
Au niveau de l’ADN, l’absorption de l’énergie du rayonnement UV provoque parfois la formation de dimères entre thymines adjacentes. Cette liaison anormale déforme la molécule d’ADN qu’une nucléase vient localement dégrader à partir du dimère. Une ADN polymérase de réparation resynthétise alors l’ADN, mais elle peut faire des erreurs ce qui entraîne l’apparition de mutations. Certaines de ces mutations ne sont pas viables (effet létal). D’autres le seront et augmenteront donc la fréquence d’apparition des clones de cellules mutantes. C’est l’effet mutagène.

Les UV

L’agent mutagène est une lumière ultra-violette de longueur d’onde 254 nm. On trouve chez les revendeurs des sources d’UV que l’on peut installer sous un carton. On peut aussi fabriquer soi-même une hotte à UV comme nous l’avons fait dans notre lycée. Comme l’expérience le montre, les matières plastiques sont opaques aux UV et des petites portes en plexiglass protègent parfaitement des UV et permettent aux élèves de voir ce qui se passe. La partie haute de la boîte en bois protège leurs yeux de l’éblouissement par la source lumineuse.

L’ensemencement des levures

On le fait au râteau en étalant le plus possible 2 gouttes de suspension de levure (tester au préalable sa suspension pour avoir une quantité de clones possible à compter : 1 clone d’1 mm de diamètre en suspension dans 1 mL d’eau stérile). Les râteaux peuvent être produits à partir d’une pipette Pasteur que l’on coude à la flamme.
On peut aussi, en raison de la disparition progressive des becs Bunsen dans nos établissements scolaires, utiliser des râteaux jetables stériles. Il est tout à fait possible de récupérer ces râteaux. On les stérilise au liquide de Milton (stérilisation à froid des biberons) puis on les passe aux UV afin de les stériliser parfaitement avant de les réutiliser. On peut travailler sans bec Bunsen à condition d’utiliser un champ stérile : un peu de papier ménage enfermé dans un papier d’aluminium et passé à l’étuve sèche durant au moins 30 minutes.

Traiter les levures aux UV

On peut passer aux UV une boîte de Pétri entière et comparer les résultats entre les différentes boîtes aux différents temps d’exposition. Mais il existe un moyen simple de voir tout sur la même boîte. Il suffit avec une lame de scalpel ou un bon cutter d’ôter 1/4 de couvercle de boîte de Pétri. Les UV étant arrêtés par le plastique, on expose successivement chaque quart d’une même boîte de Pétri durant un temps différent. Les temps d’exposition varient selon la puissance des lampes et la distance de celles-ci par rapport aux boîtes.

Faire pousser les levures

Installer les boîtes à l’envers dans un incubateur à 30 °C. En effet, les boîtes placées à l’endroit (couvercle sur le dessus) vont faire de la vapeur d’eau qui, en tombant sur la surface ensemencée, va bouleverser les clones.

Il faut compter 4 à 5 jours pour que les clones soient bien roses et, au bout d’une semaine, les résultats sont parfaits pour la lecture. Si on ne dispose pas d’incubateur, les levures se développent très bien mais un peu plus lentement à la température des salles de classe.

Les résultats observés

On observe

  1. Une diminution du nombre des clones (effet létal) au fur et à mesure que l’exposition aux UV est plus longue.
  2. Lorsque le nombre des clones diminue, leur diamètre s’accroît.
  3. Le pourcentage de clones blancs augmente avec la durée de l’exposition aux UV.

Pour dénombrer les levures

On dénombre les levures à l’aide d’un stylo feutre pour écrire sur les transparents de rétroprojection. Deux cas se présentent :

  • Cas 1 : Les élèves ont ensemencé régulièrement les levures. Les clones sont répartis de façon à peu près homogène sur toute la boîte. On dénombre tous les clones présents. Le dénombrement pose problème pour le quart non exposé aux UV qui présente une forte densité. On procède ainsi. On encercle la surface occupée par 10 clones, puis on la reporte 4 fois à l’aide du stylo. On obtient alors la surface occupée par 50 clones. On la reporte une fois pour avoir 100 clones. On reporte ainsi la surface de 100 clones jusqu’à 500, puis 1000 et ainsi de suite. Le dénombrement est rapide. Pour les secteurs exposés aux UV, on peut reconduire la même méthode ou compter le nombre exact.
  • Cas 2 : Les élèves ont mal étalé les levures et les bords de la boîte par exemple sont totalement dépourvus de levures. Les quarts se chevauchent un peu, les élèves ayant mal ajusté le couvercle évidé lors du passage aux UV. On dénombre les clones contenus dans plusieurs petites surfaces échantillon. Pour cela on produit un cache en plastique transparent percé d’un trou carré de 1 cm de côté. Le carré plastique évidé sur 1 cm2 de surface est installé sur une zone à densité moyenne caractéristique du quart considéré. Le nombre de clones visibles dans le carré est dénombré. Pour les clones à cheval sur la limite, ils comptent pour un demi-clone. On peut poser le carré sur trois endroits et calculer une moyenne. J’ai obtenu ainsi les résultats suivants (tableau ci-dessous) :
Résultats des comptages
Durée d’exposition aux UV (secondes) Nombre de clones par cm2 Nombre total de clones blancs
0 200 20
30 22 3
45 12 2
80 7 1

Le « truc » pour réussir :

Les levures ne doivent pas être ensemencées avec une trop grande densité. Sinon, on obtient des tapis tout blancs et on ne peut pas dénombrer les clones, car ils ne sont plus isolables.
 

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